LE MORINGUE
C’est la fête : au village, en bas,
Leur coupe-coupe au bout du bras
Bien affûté sur un caillou ;
Ils arrivent d’un peu partout.
Les gros tambours du moringué
Appellent au combat simulé :
Ils pulsent un tempo coronaire
Comme le flux dans les artères.
Les combattants du moringué
Se défient au milieu des cris.
Les plus vieux chassent les petits
Qui dépassent le cercle de craie...
Les dents, les yeux, les peaux luisent…
La bangué, leur herbe magique
Leur fait rouler les mécaniques.
Les dents, les yeux, les peaux luisent…
Pendant ce temps, à marée basse,
On entend le choc des rouleaux,
Les grandes lames qui se cassent
Sur le platier, sur les coraux…
C’est la fête : au village, en bas
Drôle de fête, drôle de nuit !
Gare à ta tête, coupée ras,
Gare au coupe-coupe, l’ami !
Un moringué, rumba dans l’air,
Banal, soudain déconnecte,
Fête aux marrons qui dégénère
En mettant en l’air quelques têtes…
Et pendant ce temps-là, parmi les cris de fête
Et les piaillements pénibles des roussettes,
On entend des couacs venant du marigot ;
Batraciens, crapauds-buffles et grenouilles-taureaux